J'appartiens à l'une des générations pour lesquelles la "bonne éducation" consistait à ne pas s'exposer et encore moins à exprimer fortement ses sentiments. Mais dans les faits, une disparition vous donne soudain l'expérience permettant de constater que cette éducation n'est pas la "bonne". La disparition d'un être cher qui vous fait subir une douleur considérable comme si demain devenait impossible. Et vous apprenez alors que la belle harmonie des temps agréables n'est que la dette ouverte de l'ampleur de la tristesse quand ces temps agréables disparaîtront. Comme cette tristesse imposera sa dureté, il ne faut pas être économe des expressions d'amour. Fort de ce constat, Aspen a été le 1 er chien auprès de qui j'ai pu lui exprimer aussi souvent, quotidiennement, mon attachement. Avec Marie, avec qui son lien était particulièrement étroit, nous avons appris à prendre notre temps pour elle. Avec elle. Choisir les aliments qu'elle aime. Attendre son "soupir de contentement" pour nous endormir avec paisibilité. L'aider dans les épreuves dont deux opérations très très lourdes. Lire des ouvrages techniques pour apprendre à mieux dialoguer avec elle. Elle a partagé toutes les préparations de Jonathan et Thomas pour leurs concours, restant à leurs côtés des journées entières. Le soir, lors de dîners, nous plaisantions en disant "Aspen étudie l'informatique, puis le droit". Et cette semaine, tout s'accélère. Son coeur ne permet pas l'opération de plus. Ses forces la quittent. Bouger lui devient impossible. Une hémorragie produit l'irréparable. Le rendez-vous de la séparation physique a sonné. Hier, Aspen s'est donc endormie. Et notre souffrance est à la hauteur de l'harmonie partagée chaque jour de ces 12 années. Immense !
Répondre à Maurice CROS Annuler la réponse.