Denis Bonzy

Grenoble : violences urbaines : l’échec d’une forme de République

La situation gravissime de la Ville de Grenoble avec un quartier soumis de fait à une forme de couvre-feu, blindés quadrillant les axes de circulation est l’illustration dramatique de l’échec d’une forme de République qui dépasse de loin cette seule ville moyenne de province.


C’est d’abord l’échec de la République des mots :


l’insécurité ne se combat ni par la compassion généralisée ni par l’invective vengeresse. La reconquête de l’ordre public passe par des mesures inscrites dans la durée, connues de tous, inspirées des exemples qui ont marché ailleurs, avec des statistiques publiques permettant à chacun de juger de la réalité des résultats dans le temps.

Il faut des actes, des actes clairs qui s’inscrivent dans la durée. Si l’insécurité s’est développée, c’est parce que la délinquance n’a été confrontée qu’à des mots. Le passage à l’acte est tellement difficile que des décideurs publics proposent des « Assises » ou des « Grenelle » , bref, un colloque de plus. Toujours des mots !


C’est ensuite l’échec de la République de l’opacité : avec la décentralisation qui mêle toutes les compétences, plus personne ne sait qui fait quoi. L’Etat renvoie aux effectifs de la police municipale quand le Maire retourne la question sur les effectifs de la police nationale. Cet échec montre qu’il faut de la clarté dans les compétences, donc de la clarté dans les responsabilités. A force de se passer le mistigri, tout le monde perd.


C’est l’échec de la République sans chiffre public stable : quelle démocratie peut se permettre de casser le thermomètre dès que la fièvre monte ? C’est pourtant ce qui est fait en France en permanence. Tout est manoeuvré dans tous les sens pour que le chiffre soit instrumentalisé pour servir une propagande. La statistique publique a perdu tout crédit. C’est une situation très grave. La délinquance à la Villeneuve comme le taux de chômage, pourquoi ces chiffres ne sont-ils pas publiés mensuellement ? Si c’était le cas, la réalité des situations serait connue de tous et depuis longtemps. 


C’est l’échec de la République où tout se vaut : bien sûr que chaque perte humaine est un drame et ce sans la moindre exception. Mais qui peut permettre de confondre victime, agresseur et professionnels de l’ordre ? Ces derniers ont aussi une mère, une épouse, des enfants. Qui peut imaginer partir au travail pour se faire tirer à balles réelles à vue ? Pour les victimes, c’est une vie entière qui bascule et parfois à jamais. Quant aux agresseurs, ils sont les seuls, à la différence des autres, à avoir pris une responsabilité qui ne dépend que d’eux.


C’est l’échec d’une République sans principe : ou plutôt c’est l’échec d’une République où le seul principe c’est la course à la prochaine élection. Une fois au pouvoir, il faut savoir prendre le risque de perdre des élections pour défendre des combats qui concernent plusieurs générations et pas seulement le prochain scrutin qui pourrait justifier propos fades, formules creuses et actions évanescentes.


C’est cette forme de République qui sera au coeur de la prochaine présidentielle avec des choix clairs.


C’est peut-être la première fois qu’une élection présidentielle sera le point de passage d’enjeux aussi importants parce que la crise atteint des sommets sans précédent dans la quasi-totalité des domaines. 


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Commentaires

Une réponse à « Grenoble : violences urbaines : l’échec d’une forme de République »

  1. Avatar de Benjamin
    Benjamin

    Dure mais si réaliste…telle est la teneur de votre discours Monsieur Bonzy. Effectivement, le constat est sans appel. Il y a une République en crise, plus précisément les institutions de celle-ci.
    Non seulement elle n’est plus respectée mais elle n’a pas su se faire respecter.
    L’actualité nous offre principalement deux exemples. D’un côté, le cambriolage à Grenoble et de l’autre les violences à Saint-Aignan.
    L’un des points communs réside dans le déchainement de violence qui a fait suite à la mise hors de nuire d’individus dangereux pour la société. Les policiers dans l’exercice de leur fonction, ont tenu leur rôle.
    La différence maintenant, à mes yeux du moins, est illustrée par le rapport des communautés à la République. En effet, on a d’une part les déçus, dans le cas de Grenoble et d’autre part, ceux qui n’en ont jamais voulue (pour les gens du voyage à Saint Aignan). Partant de ce constat, il conviendrait d’avoir des réactions ciblées sur chaque problématique et ne pas croire à un remède miracle qu’un druide pourrait concocter.
    Cordialement

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