Denis Bonzy

Catégorie : International

  • La violence sexuelle faite-elle partie de la « culture française » ?

    Silence

    L'examen de faits mérite l'attention. En France, une Sénatrice interpelle un Ministre sur des faits graves de possibles violences sexuelles. Conséquence pratique : aucune. Discrétion quasi-totale. Même pas une investigation journalistique digne de ce nom. A chaque rentrée universitaire, le bizutage fonctionne de façon souvent humiliante pour les filles. Des évolutions ? Aucune. Des collaboratrices parlementaires font un site pour libérer les paroles. Des reportages à des heures de grande écoute ? Rien.

    Et la liste pourrait durer longtemps. Où en est l'affaire Baupin par exemple ?

    Comparons les faits :

    1) Aux Etats-Unis, Trump a plié sa campagne avec 6 révélations vieilles de 15 à 20 ans. Kirsten Gillibrand a mené des investigations parlementaires sur les violences sexuelles dans l'armée avec sanctions fortes à l'appui. Les auditions parlementaires voyaient défiler les états-majors ayant à répondre de faits précis.

    Armée US violence sexuelle

    La liste des Gouverneurs  conduits à démissionner est longue suite à une révélation d'harcèlement. La Californie a mis fin à toute prescription pour les violences sexuelles. Ils peuvent être poursuivis sans considération de délais pour être sanctionnés !

    2) Au Canada, une loi très sévère est en préparation à l'initiative du mouvement «Québec contre les violences sexuelles» qui revendique également un financement adéquat des organismes luttant contre ce fléau, le déploiement d'une campagne de sensibilisation grand public et l'instauration d'une formation annuelle pour les recteurs et l'ensemble des élus de l'Assemblée nationale.

    Quand on constate la différence de traitements pour des faits identiques, il y a matière à se demander si la violence sexuelle ne fait pas partie intégrante de la "culture française" ? Une sorte d'héritage de la monarchie qui légitimait le droit de cuissage des puissants et le cortège des maîtresses. Ce pays ne s'est jamais remis des épisodes les plus détestables de son Histoire, celui-là comme tant d'autres. C'est quand même triste de devoir le constater si souvent à ce point.

  • Quand le système est cassé

    Paul Ryan 17 07 16

    Hier, Cécile Duflot a essuyé une défaite cinglante. Il y a encore quelques semaines, les sondages la donnaient gagnante et facilement. Des médias de gauche comme le Huffington Post l'annonçaient même déjà comme la "révélation probable du 1er tour de la présidentielle". Et le Jour J = plongeon. Par définition, il n'est pas possible de sonder avec rationalité quand l'échantillon de base n'est pas sécurisé. Même si l'échantillon est sécurisé, c'est déjà difficile quand 30 % des votants se déterminent en moyenne dans les derniers jours. Mais quand l'échantillon de base est totalement aléatoire, c'est du jeu et non plus de l'expertise.

    Pour des primaires, c'est la différence entre dire oui à un vote et donner un nom en étant assis dans le fauteuil douillet de son salon lors d'un sondage téléphonique et le Jour J prendre sa voiture pour aller voter, faire 15 kilomètres, neutraliser une 1/2 journée de week-end …

    Les Etats-Unis ont connu cette année de nombreux sondages pour des primaires locales. Le 5 août dans le Wisconsin sort un sondage. Un inconnu (Paul Nehlen) est donné gagnant face à Paul Ryan (ex co-listier de Mitt Romney en 2012 et Speaker de la Chambre / photo ci-dessus). Nehlen doit battre Ryan : 48 / 41. Et les médias se déchaînent. Le 9 août, le vote a lieu : Ryan = 84 % et Nehlen = 16 % ! Les partisans de Ryan avaient voté et les indécis et indépendants plus favorables à Nehlen étaient restés chez eux. La différence entre répondre à un sondage téléphonique en 5 minutes et se déplacer le Jour J en consacrant tout le temps nécessaire. 

    Les médias connaissent cette réalité. Les instituts de sondages aussi bien entendu. Mais les médias doivent alimenter l'information et les instituts de sondages doivent vendre des sondages même en ayant conscience de leurs lourdes imperfections. Quand un système avance sur de telles "bases", il est manifestement cassé.

  • L’airpocalypse …

    Jour du dépassement planète 17 08 15

    A mesure que les défis sont urgents et violents, la classe politique française se déchire sur des banalités de second ordre. Les effets collatéraux de Mossoul peuvent être terribles tout particulièrement pour les pays membres de la coalition internationale dont la France et la France débat de qui va … voter aux primaires : la gauche peut-elle participer à la désignation d'un candidat de … droite ?

    Sur le plan local où tout est prétexte pour les déchirements ostentatoires, le débat passionné porte sur l'économie de 30 € par mois sur les stationnements. 

    Et la liste pourrait durer longtemps des hors sujets. Deux débats mettent en cause notre survie : la choc des religions et le réchauffement climatique. Dans le 1er cas, les mots font défaut par faute de courage politique : ne pa sdésigner l'ennemi. Dans le second cas, les mots font défaut par faute de lucidité de professionnels de la politique coupés des réalités internationales et par la responsabilité de "faux écologistes" français qui sont passionnés d'abord par la gauche radicale et non pas par l'environnement.

    Dans cette ambiance, c'est l'airpocalypse assurée. A force de rien régler, nous sommes sûrs d'être étouffés avant d'étouffer tout simplement. Irréel. 

  • Quand les publicités vont quitter la télévision pour … Facebook

    Facebook locaux bis

    Le 5 octobre 2016, les aides à la presse papier ont été publiées. Au total, c'est près de 128 M€ pour 326 titres. Comme contribuables nous avons versé ainsi 3 590 000 € à l'Humanité. Chacun appréciera. Mais il y a un autre phénomène qui est en train de prendre naissance. Les études montrent que les publicités via Facebook sont plus efficaces que les écrans TV classiques. Les actes de "conversions" sont plus élevés. C'est assez compréhensible puisqu'il est possible d'opérer un meilleur ciblage. Si bien que des grandes marques sont en train d'effectuer un transfert d'une partie de leurs budgets publicitaires classiques sur des réseaux sociaux dont Facebook. 

    Après la presse écrite perfusée, la France va-t-elle inventer la "TV perfusée" avec des aides publiques bien entendu données "en toute impartialité et sans jamais attenter à la moindre indépendance journalistique" … selon les formules consacrées ? 

    La dépense publique donc l'impôt ont encore de très beaux jours en France en dépit des déclarations en la matière quand on peut considérer qu'il est ainsi possible de s'affranchir des règles du marché qui s'imposent ailleurs aux entrepreneurs, commerçants, artisans …

  • Une réalité française qui mériterait une réflexion plus sérieuse

    Trudeau 08 09 15

    Dans 3 jours, Justin Trudeau va fêter sa première année de mandat au Canada. En France, en 2014, moins de deux ans après l'élection de F. Hollande, la majorité présidentielle prenait une raclée historique. Il suffisait presque de se dire opposant à Hollande pour être … élu. Actuellement, au Canada, le parti de Justin Trudeau caracole en tête des intentions de votes avec le score de 53 % très largement devant tous les autres partis.

    Dans quelques semaines, Barack Obama va quitter la Maison Blanche après 8 ans de pouvoir. En France, le pourcentage d'opinions favorables de Hollande est de 16 % après 4 ans de pouvoir. Aux Etats-Unis, la notion qui s'approche le plus de ce concept est celle du taux d'approbation. Le dernier sondage publié par CNN la semaine dernière, le taux d'approbation de Barack Obama est de 55 % ! 

    Obama 18 11 13

    Contrairement à l'idée désormais répandue en France, il n'y aurait pas une impopularité mécanique liée à l'exercice du pouvoir. Et pourtant aux Etats-Unis et au Canada, les médias n'ont pas la même culture complaisante que bon nombre de médias français très légitimistes. 

    C'est un fossé de décalage qui mérite l'attention plutôt que de se complaire dans l'idée d'une exception française comme si exercer le pouvoir devait être un exercice sacrificiel. 

    C'est quand même agréable de constater qu'il y a des démocraties où le pouvoir peut accompagner une démocratie positive. C'est une situation fragile, précaire comme le montre l'actuelle campagne présidentielle américaine. Il n'y a rien de jamais acquis. Mais lorsque les dirigeants trouvent les bonnes méthodes, l'opinion moderne n'est pas automatiquement ingérable, contestataire, prête à sanctionner. Des chiffres à méditer.

  • La France sans boussole en proie aux seuls jugements négatifs

    Obama 12 10 16

    Qu'est ce qui manque actuellement aux Français ? Des "présidences morales". Comparons avec les Etats-Unis. L'obamamania est reparti de plus belle. Hier à Greensboro en Caroline du Nord, Barack Obama a réuni des foules considérables. Aujourd'hui, aux Etats-Unis, l'opinion répandue c'est "quand je me regarde je me désole. Quand je me compare, je me console". Et le "je" concerne la présidence Obama. La comparaison avec ce qui arrive est le meilleur travail de revalorisation des années Obama. Obama va occuper la "présidence morale" et elle va compter très fort. Obama se retire à … 57 ans !

    Mais en France, qui exerce cette "présidence morale" ? Personne. VGE est trop vieux. Chirac est trop hospitalisé. Sarkozy est trop engagé. Hollande est trop décrédibilisé. En France, tout le personnel politique reste dans la course jusqu'à l'usure pour passer du Palais à la … clinique privée. Et "l'échelon du dessous", pareil. Quand les ex-Premiers Ministres ne sont pas candidats à la présidentielle (Juppé, Fillon) ou soutiens actifs (Raffarin), ils sont toujours dans le circuit en acceptant même le "déclassement" comme Ayrault. 

    Il n'y a plus de "sage". Quand ils ne sont pas hospitalisés, usés, toujours aux postes à titres divers, ils deviennent des "animateurs télés" comme un ancien président du Conseil Constitutionnel qui livre ses blagounettes sur Europe 1 aux côtés du mannequin Sublet dont l'argument ultime est de … rire.

    Faute de boussole, les Français se déchirent sur les seuls jugements négatifs. C'est là tout le problème essentiel de la vie politique française. Sous un angle surprenant, elle paye l'un des prix de la professionnalisation extrême de sa politique : des personnes qui vivent du système par le système jusqu'au dernier souffle.

  • Passer pour un idiot aux yeux d’un imbécile est une volupté de fin gourmet

    Expression baillonée

    Cette citation de Courteline est un résumé merveilleux d'épisodes de la vie. Avec les obscénités de Trump, le spectacle débute sur ce principe. Ainsi, Schwarzenegger se fait un code de bonne moralité lui qui a reconnu être le père de l'enfant de la jeune personne chargée de s'occuper de ses enfants et qui actuellement se répand dans les journaux pour indiquer que son épouse, mère de ses 4 enfants, vivait déjà avec son actuel compagnon avant ses … indélicatesses personnelles. Et tout cela pour mieux négocier les indemnités à ne pas accorder à son ex. 

    C'est comme les journalistes français qui s'émeuvent sur les moeurs de la vie politique américaine mais qui ont caché les frasques de DSK pendant des années … et surtout de tant d'autres sur les plans nationaux comme locaux. Et du côté des deux sexes pas uniquement des hommes.

    Et la liste pourrait être longue. C'est ce que la France avait connu avec DSK : le bal des hypocrites et surtout des taiseux qui ont été complices pendant tant d'années.

    Que faut-il pour que ces climats cessent : le grand déballage. 

    Mais le grand déballage suppose le courage et c'est ce qui fait le plus défaut actuellement. Le courage des victimes comme surtout celui des observateurs. 

    Pour l'instant, c'est l'étape de la citation de Courteline : s'amuser des idiots qui se défaussent sur plus imbéciles ou plus pervers qu'eux. Mais cette étape n'a jamais rien réglé même si le délice qu'elle procure reste un moment privilégié pour les observateurs. De délice ou d'indifférence tant le jeu est stérile faute de vrai droit de suite. Pathétique ! Voir le cinéma qu'un tel prédateur nullissime peut susciter à 30 jours du vote de la 1ère puissance au monde. Quels épisodes ont dû être sautés par cette démocratie pour arriver à un tel supplice.

     

  • Jusqu’où des politiciens peuvent-ils toujours creuser le trou de la vie politique ?

      Trump 10 09 16

    Depuis plusieurs mois, Donald Trump s'expose dans des conditions d'une agressivité et d'une vulgarité indécentes. Il vient de montrer que cette vulgarité fait partie de son tempérament. C'est dans les attitudes privées qu'on lit le vrai tempérament des personnes, loin des images toutes préparées où chacun tient à se montrer "bien propret en habit du dimanche dents blanches sous peau lisse". En privé, cet individu effectue des confidences qui sont d'une vulgarité sans limite à tel point que les journalistes français ne traduisent même pas les propos tenus.

    Jusqu'où des personnages de ce type vont-ils creuser le trou de la politique ? D'autres y contribuent par d'autres moyens : la littérature de Trierweiler, les programmes connus comme sans lendemain possible …

    Il faut quand même avoir conscience de faits qui se banalisent : dernièrement une revue d'idées titrait sur la "nostalgie du Roi" comme si les échecs de la République pouvaient justifier un retour de la … monarchie ? Irréel.

    La période devrait être à l'éloge de la sobriété et du sérieux pour faire face à des défis considérables (climat, religions). A l'opposé, elle devient l'époque de l'exposition extrême, celle du gaspillage dans une logique du "tout éphémère", l'indécence pour faire vivre l'audience … Avec un tel décrochage entre les nécessités plus graves que jamais et le comportement des opinions occidentales, progressivement il y a un sentiment que chaque jour nous avançons vers le pire. Le parallèle avec les années 30 devient particulièrement inquiétant.

  • La France en plein chaos politique

    Obama 07 10 16

    Michèle Cotta est l'une des meilleures observatrices de la politique française. Son dernier ouvrage porte un titre qui résume tout de l'actuelle situation française :"comment en est-on arrivé là ? Histoire d'un chaos politique." Tout est résumé par ce titre. L'interrogation comme le constat.

    L'interrogation à savoir comment un pays peut tomber aussi bas à tous les niveaux de sa représentation politique : absence de débats de fond, superficialité des mesures, cacophonie permanente …

    Le constat : celui du chaos. Parce que le terme de chaos est le bon lui qui signifie : ruine, désordre, destruction. 

    La ruine est celle de l'état des finances publiques avec des annonces qui creusent toujours davantage le trou.

    Le désordre est celui de la quasi-totalité des pans de la société : depuis une ministre qui répond au Pape sur le ton d'un laquais à congédier en passant par la bouffonnerie du sauvetage d'Alstom en passant par l'invention du scrutin à 6 tours avec des citoyens qui vont participer aux primaires de la droite puis de la gauche avant de voter au scrutin final.

    C'est du jamais vu.

    Mercredi, les Nations Unies ont validé l'accord de Paris pour qu'il entre en vigueur. Dans de nombreux pays, les chefs d'Etat ont tenu un discours solennel comme Obama aux Etats-Unis. En France, rien. L'accord de Paris a été mieux célébré en dehors de Paris qu'à Paris ! Mais à Paris c'est la course folle d'un régime qui a perdu l'équilibre et de dirigeants épouvantés par la défaite annoncée. Du jamais vu à ce point.

  • Une société peut-elle vivre sans sacré ?

    Obama 2 11 09 16

    C'est un sujet de fond qu'aborde avec un talent remarquable Régis Debray dans le dernier numéro de la Revue des Deux Mondes. Comment fonctionner quand il n'y a plus rien d'intouchable ? Aujourd'hui même l'expression du mot "sacré" conduit parfois à l'ironie, voire aux moqueries intempestives. Comment expliquer que notre société ait pu accepter comme autant "d'avancées" des "outrages" présentés comme des progrès collectifs (Marseillaise sifflée, drapeau national brûlé …). Dans certaines Communes, les espaces collectifs de cimetières ne sont même plus entretenus…

    Qu'est ce qui peut être "valorisant" de tout désacraliser ? Une valeur existe-t-elle encore si elle n'emporte pas de pénalité quand elle est violée ? 

    Dans le pays de la littérature, même les mots ne sont plus sacrés puisque l'orthographe est une discipline secondaire et que nous nous sommes à deux doigts d'accepter l'écriture phonétique. 

    Il est certain que le sacré d'hier ne peut plus être le sacré d'aujourd'hui. C'est naturel. Mais pourquoi au sacré d'hier succéderait-il le vide d'aujourd'hui à ce point ? 

    Comment délimiter en l'absence de sacré ? 

    Le sacré a-t-il disparu parce qu'il n'a pas de valeur marchande, ce qui est une monstruosité en cette période d'argent roi ? 

    C'est le vrai choc actuel derrière la guerre des religions qui est en marche : le choc entre ceux qui ont trop de sacré et ceux qui donnent l'impression de ne plus en avoir du tout. Impression ou réalité ? Et quelles conséquences ?

    Un article sublime de Régis Debray comme si souvent.