Dans son entretien à l'hebdomadaire Le Point Emmanuel Macron a au moins le mérite de montrer qu'il a une vision globale. Il est possible d'être d'accord ou pas avec cette vision. Mais elle existe. Elle est argumentée, ancrée dans une construction intellectuelle. 20 pages qui changent de la formulette destinée à faire la carte postale du jour. Dans cette vision, il y a un volet qui mérite l'intérêt : l'inquiétude exprimée sur l'esprit de cour, l'organisation des petits arrangements, la structuration des statuts qui gèlent les situations … Macron met en évidence l'intérêt de la capacité à dire "non". Sous cet angle, c'est probablement l'apport n°1. Car, ce qui est inquiétant actuellement, c'est l'émergence d'une génération qui ne connait pas assez la beauté du sens du non. Le "non" a été victime d'une déstructuration organisée de son sens pour faire vivre une génération docile amoureuse du "oui" et du mimétisme collectif. Il faut réhabiliter le "non". D'abord le "non", c'est l'autre visage d'un autre "oui". Dire "non" c'est vouloir autre chose que le "oui" refusé. Ensuite, c'est accepter qu'une conception personnelle peut compter autant qu'une conception collective qui n'est ainsi pas vouée à s'imposer par mode, par matraquage commercial, par soumission à des dogmes divers … Enfin, c'est l'expression de l'indépendance donc de la liberté à exprimer une position. Le XXI ème siècle sera la victoire de ceux qui disent "non". Le "non" a déjà donné naissance à la "nouvelle économie" parce que des entrepreneurs ont dit "non" aux circuits classiques qui s'imposaient jusqu'alors. Le "non" va devenir la grande bataille pour refuser un réchauffement climatique qui est le suicide de la planète. Et les exemples pourraient durer longtemps. La grande différence ne va pas résulter des nationalités mais des capacités à faire vivre des tempéraments "qui ne soient pas que des lèches bottes ou des mauviettes" pour reprendre l'expression de Clint Eastwood qui produit actuellement le film "15 heures 17 pour Paris" célébrant l'héroïsme au quotidien. Peut-être qu'avec des films, des articles … le "non" va retrouver la place qu'il mérite en France … ?
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« Il était si laid que, lorsqu’il faisait des grimaces, il l’était moins … »
Cette formule de Jules Renard résume la vie politique française. Il ne s'agit pas d'avancer tous positivement. Il faut d'abord lever des épouvantails pour que chacun puisse se réjouir ensuite d'être parvenu à écarter certains épouvantails. Le projet doit être tellement laid à l'origine qu'à l'issue des "grimaces" deviennent tolérables. Hier, en France, avec le projet de réforme du code du travail, c'était au tour de chacun d'accepter des "grimaces" pour éviter la "laideur" globale esquissée à certaines étapes. Au même moment, la même journée, aux Etats-Unis, près de 300 entrepreneurs leaders signent une lettre publique pour défendre un texte clair, précis. La lettre est publique. Ce ne sont donc pas des discussions de coulisses. Tant que l'économie française sera "gérée" entre une représentation patronale collabo qui cède à toutes les sirènes du pouvoir fut-il même bien de gauche comme si en France être patron devait être une croix permanente à porter et un syndicalisme ouvriériste qui rêve toujours de la lutte des classes et du "grand soir", l'économie est mal barrée dans ce pays.
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Le vrai décrochage français : l’engagement et l’exemple de la bataille de l’arrondi
Le Sud Est du Texas (soit l'équivalent d'une partie considérable des territoires français) subit actuellement un désastre. Il se reconstruira très vite. Des sportifs emblématiques, des entrepreneurs, des particuliers … vont abonder des sommes considérables pour effacer le plus rapidement possible les traces de cette épreuve historique. La faculté de résilience sera spectaculaire. Les fonds fédéraux et ceux de l'Etat fédéré ne manqueront pas. Mais les particuliers vont changer la donne. Dès hier soir, sur Instagram, un joueur de basket lançait l'opération au moins 25 000 dollars pour le Texas. Et la liste des donateurs d'au moins 25 000 dollars s'allongeait de minute en minute. Il y a 3 jours pour défendre les sanctuaires naturels, Yvon Chouinard (Patagonia) achetait pour 700 000 dollars une pub TV pour appeler à la mobilisation face aux menaces de l'administration Trump. Et la liste d'exemples des engagements privés pourrait durer longtemps. En France, historiquement, la donation a été d'abord le fait de l'Eglise dans sa vocation sociale. Puis cette source s'est appauvrie. L'Etat lui a succédé. Mais l'Etat s'est appauvri à son tour perdu dans une foultitude d'aides le détournant de ses fonctions essentielles comme le montrent actuellement dramatiquement par exemple les photos des moyens de forces de l'ordre ou de Défense. Il n'y a pas d'étape suivante en France. C'est toujours à l'Etat de faire. Si l'Etat ne fait pas tout de suite, c'est le scandale, l'impopularité. On le vit actuellement avec l'installation de Macron. On peut être pour ou contre sa politique. Ce n'est pas la question. Mais qui le désenclave ? Le patronat français demande des mesures mais explique-t-il pourquoi elles seraient utiles au grand nombre ? Non. Il y a un choc seulement entre ceux qui doivent faire et ceux qui s'opposent. Et les autres sont où ? Ils observent. Ils attendent. C'est le véritable décrochage français : l'engagement est en berne. Des engagés peuvent perdre. Ils peuvent aussi gagner. Ce qui est sûr, c'est que faute d'engagement les personnes concernées ont beaucoup moins de chance de gagner. Tant que la bataille de l'engagement de chacun ne sera pas livrée, l'immobilisme et les blocages seront les seuls vainqueurs. Or cet engagement peut revêtir des aspects parfois simples aux conséquences pourtant considérables comme la bataille de l'arrondi. Des sites se multiplient dans ce cadre. Des sommes parfois significatives sont collectées. S'engager ce n'est pas que voter. S'engager c'est faire respecter sa qualité de citoyen chaque jour et non pas un seul jour tous les 5 ou 6 ans. Le jour où l'engagement aura changé en France, la vie publique changera alors bien au-delà du seul état civil de son Président.
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Où est la France qui fait ?
A continuer à ne mettre en relief que la France qui parle ou celle qui dérape, des médias vont dissuader les dernières personnes qui ont encore envie de faire. La France qui parle, c'est la "France politique" qui parle encore et toujours sans même avoir souvent quelque chose d'innovant ou de sérieux à dire. C'est un "gavage" de la pensée avec la méthode des éléments de langage qui accompagnent la tournée des plateaux TV ou radios. Entendre les mêmes mots. Les mêmes formules. Comme si à force de répéter, une vérité fut-elle fausse pouvait s'imposer. La France qui dérape, c'est celle des faits divers. Plus la France dérape dans le glauque, plus des médias couvrent. C'est une ambiance insupportable. Où est la France qui agit ? Celle qui crée, qui innove ? C'est la grande différence entre l'information outre-atlantique (Canada, Etats-Unis / je ne peux pas parler d'autres pays car je ne les connais pas assez) et l'information française. En France, celui qui agit n'existe pas. Il faut parler ou déraper pour compter aux yeux de médias. Et d'ailleurs la France qui parle est tellement proche des médias que ceux qui ont été virés par les urnes reviennent par les ondes en constatant le nombre désormais irréel de politiques usés, dévalorisés, décrédibilisés qui deviennent … journalistes. Pourquoi cette situation ? Parce qu'agir en France, c'est ce qui se compte le moins : les faits, les comparaisons, les chiffres justes, les innovations prometteuses …. Prenons des exemples concrets :
- l'été 2017 est meurtrier pour les animaux domestiques (abandons records, vols pour trafics ..) : que se passe-t-il ? Rien. A Boston, le mercredi 24 août 2016, Charlie Baker mettait en oeuvre un arsenal de mesures concrètes. La France n'est même plus capable de copier ce qui marche ailleurs. Et pourtant sur de tels sujets, comment imaginer des blocages syndicaux ?
- les hôpitaux : pour certains examens le malade est convoqué avec la fourniture de produits que l'hôpital public économise parce qu'il n'y a pas de petites économies pour l'hôpital public quand en même temps Macron nomme Royal (une recyclée parmi tant d'autres !) avec une flotte de collaborateurs et de moyens matériels pour surveiller les … pôles,
- l'ouragan Harvey aux Etats-Unis la question traitée pour des médias US c'est : est-ce une preuve de plus du dé-règlement climatique ? En France, au même moment, c'est le nombre de morts sur un déferlement d'images chocs,
- … : et la liste pourrait durer longtemps encore.
Cette situation est insupportable. Elle use une majorité politique en un seul été. Et elle lasse les citoyens qui s'écartent de ce climat irresponsable même pour les plus engagés d'entre eux désormais.
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Le fipronil et l’allergie à la « réforme » …
Hier, Macron évoquait une supposée allergie des Français à la réforme. Mais les Français ne sont pas allergiques à la réforme. Ils sont allergiques à l'action, à l'initiative, à la mobilisation,. Prenons des exemples concrets et récents : le scandale du fipronil. Dans certains produits, nous mangeons de la "merde" parce que des producteurs préfèrent augmenter leurs profits plutôt que de respecter la qualité de leurs produits donc respecter leurs clients. Que se passe-t-il ? Rien. Une action collective en justice ? Même pas puisque la gauche a tellement verrouillé ce dispositif que c'est un parcours du combattant très protecteur des grandes industries et non pas des consommateurs. Des associations donnent-elles la liste des marques à boycotter ? Même pas. Et pourtant, ce serait la meilleure façon de les responsabiliser que de les pénaliser là où ces marques pensaient gagner : le porte monnaie. Rien ne se passe. Comme il ne se passe rien sur le dossier de la chloration permanente durable de l'eau reconnue comme porteuse de cancers ou les canalisations avec de l'amiante car l'amiante ingérée est aussi dangereuse que l'amiante respirée. Quand les Français ne bougent même plus quand ils mangent ou boivent de la "merde" qui met en cause leur santé, il ne peut plus être question d'allergie aux réformes mais d'allergie à toute action possible. Ce qui est plus qu'une nuance. La véritable priorité serait actuellement de s'interroger sur les facteurs de cette apathie généralisée. Parce que si ces facteurs là ne changent pas, il n'y a pas de doute à avoir, aucune victoire collective sérieuse ne sera possible dans l'actuelle compétition en dehors de "sucettes d'ivresses passagères" comme organiser les JO que plus personne ne veut ou s'offrir un jeune président pour une vieille nation sans ressort.
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Une époque tristement en panne de belles légendes
Il y a quelques semaines, regardant l'émission de M6 (66 minutes) sur les YouTubers à succès, j'ai été "secoué" par la remarque alors diffusée dans le reportage d'un diplômé d'une grande école exprimant sa stupéfaction dans les termes suivants "j'ai Bac + 7 et je gagne moins qu'une gamine de 14 ans expliquant sur YouTube comment elle se … maquille !". Cette remarque pleine de sincérité servait de lancement au reportage à suivre sur la … gamine de 14 ans et ses vidéos à très fortes audiences donc très rémunérées. Il y avait du bon sens, du désespoir et déjà un germe de travers de l'actuelle époque : réussir est-ce seulement beaucoup gagner financièrement ? L'époque actuelle manque tristement de belles légendes qui permettent de s'interroger, de donner du sens, de construire des rêves positifs. Une des belles légendes qui mériterait d'être davantage connue, c'est celle d'Yvon Chouinard et de Patagonia. A plus forte raison, l'été où il fête les 60 ans de son lancement dans la vie d'entreprise. Passionné d'alpinisme, Yvon Chouinard se lance courant l'été 1957 dans la création de ses propres matériels. Il les fabrique dans l'arrière cour de ses parents à Burbank (Californie). Il les charge dans le coffre de sa voiture et part les vendre aux commerces spécialisés. Quelques mois plus tard, devant le succès de ses matériels très solides, il crée Chouinard Equipment, qui précède Patagonia. A la tête de Patagonia, Yvon Chouinard va respecter les règles de vie de ses débuts : non à l'hyper-consommation, l'éthique écologique et surtout le capitalisme responsable. Aujourd'hui, Patagonia est une marque internationale reconnue. Plus de 2 000 salariés. Une culture du respect des sanctuaires naturels comme des espèces animales. Bref, une belle légende. Comment des générations neuves peuvent-elles se construire sans des belles légendes ? C'est une interrogation majeure de l'époque actuelle. Car la légende fait vivre le rêve et sans rêve c'est quand même difficile d'entreprendre dans n'importe quel domaine. C'est probablement là ce qu'il y a de plus inquiétant dans l'actuelle époque.
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La France et ses Robin des Bois à l’envers
Aujourd'hui, les agriculteurs attirent de nouveau l'attention sur des situations dramatiques. C'est la caricature d'une France avec ses Robin des Bois à l'envers. Robin des Bois prenait l'argent aux riches pour les donner aux pauvres. En France, c'est le contraire : prendre l'argent aux pauvres pour le donner aux … riches. C'est tout le problème de l'agriculture dans le rapport entre le producteur et la grande distribution. La grande distribution est intouchable en France après avoir probablement été le plus grand corrupteur historique de la vie politique française. Au-delà de l'agriculture, la France a deux problèmes : son rapport aux prix et sa politique sociale. En France, le prix est devenu le critère de choix, voire de qualité d'un service ou d'un produit. C'est un non sens absolu. Il y a beaucoup trop de produits et de services qui ne sont plus payés au "juste prix" c'est à dire celui qui assure une qualité du service ou du produit et une rémunération pour tous les intervenants. Le bas prix est devenu une composante de "politique sociale" ce qui est aussi un non sens total. Il vaut mieux un "vrai prix" avec des fortes aides sociales individualisées sur la base de critères techniques solides qu'un dispositif confus qui tourne à la pagaille qui sert aux plus forts. C'est le système français avec ses Robin des Bois à l'envers. Une déviation qui risque de conduire à l'explosion.
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La France toujours coincée dans le choc entre les marchands et les administratifs
Avec l'installation de sa nouvelle majorité parlementaire, la France montre combien elle reste coincée dans le choc entre ses marchands et ses administratifs. Deux mentalités différentes. Il ne s'agit pas de les hiérarchiser mais de noter les différences. Le marchand est celui qui vit dans le secteur privé. Son univers c'est de vendre pour vivre : vendre des produits, des services … Il sait que sa situation matérielle peut vite progresser mais qu'elle peut aussi connaître une érosion brutale. Il a donc intégré la précarité. Il a dû intégrer aussi la compétition permanente, soudaine, imprévisible. L'univers de l'administratif est différent. Presqu'à l'opposé. Son univers est celui du service non rémunéré à la tâche. Bien davantage, la rémunération reste la même que le service soit de qualité ou qu'il ne le soit pas. Il a la durée pour lui. Et surtout, il n'y aura pas de concurrence légale qui ne soit pas acceptée par lui ou du moins par sa hiérarchie. Tout oppose ces deux univers. Le politique prend la mentalité de l'administratif dès qu'il se professionnalise dans la politique. Le problème en France, c'est que ces deux univers se croisent peu. Il n'y a pas de points de passages de l'un vers l'autre. C'est le résumé de l'actuelle situation politique en France. Une nouvelle génération est arrivée au parlement. Bon nombre d'entre eux sont des "marchands" de la société civile. Que leur est-il demandé ? De faire comme hier et de devenir aussitôt des "administratifs". La négation même de leur offre de campagne. Comme si ces deux univers ne pouvaient pas se mêler. Dans le même temps, hier, aux Etats-Unis, Politico évoque la candidature de Deval Patrick en 2020 (photo ci-dessus). C'est l'opposé de ce choc. Il n'a fait que 8 ans de politique (2006 – 2014). Avant, il avait son cabinet juridique. avec les difficultés de l'indépendant. En mai 2008, j'ai assisté à Cape Cod à l'une de ses réunions. Il ne parlait que de la vie de tous les jours. Les difficultés simples de la vie quotidienne. Puis après 2014, il est retourné au privé (Bain Company). La situation changera réellement en France le jour où ces deux "mondes" se croiseront en permanence. Cela ne semble pas pour demain, hélas.
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Pourquoi en France, le pouvoir politique c’est d’abord montrer que l’on … règne ?
Le magazine Rolling Stone consacre sa couverture à Trudeau. Il est sympa et surtout s'occupe du quotidien : incendies en CB, baleines noires qui décèdent en nombre, emplois liés au libre échange … Il se déplace souvent avec son épouse, très sympathique et parfois même avec leurs enfants. Trudeau ajoute de la vie au pouvoir. Quand il a commis une admonestation trop rugueuse au Parlement, il s'est … excusé ! Et la liste pourrait durer longtemps. Trudeau s'occupe de la vie quotidienne. Parfois avec un peu trop de com. Mais de la vie de tous les jours. En France, dès l'accession au pouvoir, il n'est plus question de vie quotidienne mais de surtout montrer que l'on … règne. Régner, c'est exercer les attributs de la domination. Un détenteur de pouvoir politique en France doit d'abord montrer qu'il règne et à tous les niveaux parfois encore pire sur le plan local avec une "mentalité de petit chef" particulièrement déplaisante. L'opposé de la gouvernance moderne qui suppose l'adhésion, la participation et pas la domination. Pas surprenant qu'avec de tels réflexes, la crise soit au coin de toutes les rues avec un tel contre-sens qui n'est même plus vécu dans les entreprises privées.