Donald Trump vient de provoquer un choc fiscal d'une ampleur totalement inédite. 1 500 milliards de dollars de recettes fédérales en moins. Son argument est celui exposé dans les années 80 par l'économiste Arthur Laffer. Il avait inspiré la campagne de Reagan. Mais ensuite Reagan a donné la priorité à la puissance internationale des Etats-Unis bien davantage qu'au grand choc fiscal. Ce choc fiscal c'est quoi ? C'est considérer que la reprise du moteur de la croissance passe par la diminution des impôts et que le gain de l'imposition sur les produits de la croissance compense par la perte initiale des produits de l'imposition. David Stockman, Arthur Laffer … ont été incapables de donner corps à leur théorie. L'application qui s'en rapprochait le plus a été la Proposition 13 en Californie appliquée au foncier. L'application a été trop limitée pour en tirer des conséquences fiables.Ce que vient de mettre Donald Trump sur le tapis avec son choc fiscal, c'est énorme. S'il réussit, c'est une nouvelle donne internationale majeure. S'il échoue, les Etats-Unis seront dans une impasse financière particulièrement préoccupante compte tenu par ailleurs du niveau de la dette fédérale. La Casino est ouvert et l'enjeu est gigantesque.
Catégorie : Entreprises
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Climat : les Etats sont-ils contournables ?
L'ouverture demain d'une conférence internationale de plus sur le thème de la lutte contre le réchauffement climatique pose une question de fond : les Etats sont-ils contournables ? On assiste actuellement à deux mouvements qui méritent l'attention : le municipalisme et l'appel aux fonds privés. Avec le "municipalisme", c'est le sentiment que le local pourrait faire à la place de l'Etat. Avec les fonds privés, c'est l'idée que des grandes fortunes peuvent "remplacer" les Etats. Les deux sont dans le faux ou plutôt dans la seule communication. Le municipalisme vise à faire vivre un pouvoir de proximité. Les fonds privés vivent à faire vivre des corrections d'images. C'est comme quand Rhône-Poulenc finançait Ushuaia. Les cycles de production, les fumées, l'exposition des salariés à des pollutions gravissimes … : rien n'avait changé chez Rhône Poulenc mais la vitrine permettait de se refaire une "morale". Il y a des domaines où les Etats ne sont pas contournables. Les autres initiatives, locales ou privées, ne peuvent que démultiplier les actions des Etats. Mais pas les remplacer. Au passage, la conférence de demain montre surtout l'enfumage de la COP21 : qu'est ce qu'un engagement sans conséquence contraignante ? Qu'est ce qu'une action planétaire sans solidarité financière à destination des pays les plus pauvres ? Tant que ces deux questions de bon sens n'auront pas de réponses, il ne s'agira que d'actions de communication sans effet réel sérieux sur le jour d'après. Et cette superficialité ne fait que renforcer l'impact ultérieur de la revanche des faits d'une planète qui va de plus en plus mal car agressée de façon de plus en plus sévère avec des espèces animales en péril. A ce rythme, l'être humain sera peut-être la dernière espèce à disparaître mais mourir le dernier est-ce un objectif mobilisateur ? C'est la seule vraie question de la présente période.
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Et il paraît que l’intendance devait … suivre dans une logique totalement accessoire
Ce week-end, Amazon a franchi de nouveaux records. Le succès de la logistique. L'action en Bourse sur la seule année 2017 est passée de 753 dollars à 1 193 dollars. Même progression pour Google : passage sur la même séquence temps de 827 à 1 069 dollars. En coeur de métier, Google c'est d'abord la bibliothèque en ligne des articles des autres. Une autre forme d'intendance. Au départ, Google comme Amazon ne produisent rien. Google n'est pas auteur ou éditeur. Amazon ne fabrique pas de produit. Ils produisent une autre … intendance. Et ils donnent une sacrée leçon à celles et à ceux qui estimaient que l'intendance suivrait toujours de façon accessoire face aux créateurs. Mais une nouvelle étape s'ouvre : la bataille dans l'intendance. Au moment où Amazon crevait un nouveau plafond, en France les Galeries Lafayette annonçaient la fermeture de 22 magasins …
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La guerre des voisinages
Cette semaine, enfin, un hebdomadaire de grande diffusion (L'Express) donne la parole à Christophe Guilluy). J'ai souvent fait référence à ses publications. C'est une approche très impertinente face au politiquement correct français. Mais un fait ne devient pas juste parce qu'il serait répété. Guilluy est actuellement celui qui effectue à mes yeux le meilleur diagnostic sur deux faits essentiels : la coupure entre Paris et la Province, le choc nouveau entre les villes centres et les périphéries. Dans les deux cas, des actuelles analyses souvent erronées conduisent à des fautes graves. Paris ignore la Province. Un microcosme pour une grande partie avec des relations d'affaires incestueuses fonctionne sur un entre soi qui méconnaît totalement les réalités du reste du pays. Il suffit de rencontrer les intéressés pour être surpris par ce choc. C'est ce qui sera le probable socle de prochains grondements considérables. La seconde faute réside dans l'affirmation de villes-centres qui veulent désormais imposer une structuration en rupture avec la tradition de leurs périphéries comme si ces périphéries étaient les "chasses gardées" des terres de replis. Ces deux voisinages qui s'ignorent (Paris / Province, Villes-centres / Périphéries) sont les deux facteurs de fond des explosions à venir en France. C'est probablement le tournant structurel des "années Macron". Si lui et surtout si sa majorité parlementaire restent ou deviennent trop les élus de Paris et des métropoles, c'est l'annonce de crises majeures. A ce jour, la guerre des voisinages chauffe déjà. Paris ignore trop la Province. Les villes-centres structurent trop les agglomérations en fonction de leurs seuls intérêts. La crise des périphéries se résume parfois à la déshérence d'un équipement qui structurait hier l'animation conviviale d'un quartier. La guerre des voisinages a débuté et elle peut être redoutable sur ses lancées actuelles.
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Les 2 points faibles majeurs du système français
Demain 16 novembre, May Boeve (photo ci-dessus) va recevoir le prix "nouvelles frontières" décerné par la JFK Library à Boston. Son association 350.org fait des actions concrètes remarquables pour la lutte contre le réchauffement climatique. Ils demandent rien à l'Etat. Ils font. Ils agissent. Ils vivent leur citoyenneté en permanence c'est à dire en téléphonant à leurs parlementaires avant les votes, en publiant les votes … C'est un message fort au moment où la COP23 à Bonn multiplie les impasses manifestes montrant l'immensité du fossé entre les mots et les actes, entre les mots et les financements. En France, tout est attendu de l'Etat. Si l'Etat ne fait pas, on dirait que toute autre action est impossible, illégitime, vouée à l'inefficacité, à l'échec. Or l'Etat français c'est le "nouveau pauvre" du nouveau siècle. Tous les budgets que je connais de façon détaillée sont gérés pour sauver la vitrine mais mettre le back office à la diète la plus sévère. 1er point faible redoutable, l'Etat ne change pas la donne pour rendre l'action à la société civile.
Second exemple, lundi 13 novembre, Bill Gates sur son blog a posté une vidéo annonçant qu'il donnait 50 millions de dollars à un centre de recherche sur Alzheimer. Les maladies neuro-dégénératives sont le prochain fléau. C'une tragédie humaine individuelle et familiale terrible. C'est un gouffre financier collectif immense à venir. En un jour, son don représentait 5 fois ce qu'en France, la principale association collecte par an à partir de 87 108 donateurs en 2016. En France, les noms des "méga riches" sont connus via Panama Papers ou Paradise Papers. Comment est-il possible d'imaginer que notre pays pourrait se réconcilier avec la légitimité morale de créer d'immenses fortunes quand des noms emblématiques ne vivent que la richesse cachée égoïste ?
Avec de tels points faibles (le non sens dans la direction de l'Etat comme la faillite admise de l'image de marque des grandes fortunes), la France cumule deux points faibles majeurs dans le monde moderne. A circonstances constantes, ce sera difficile de s'en remettre.
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Une réalité à mieux considérer : la personnalité géographique
Il m'a fallu beaucoup de déplacements pour me faire à une idée : la personnalité géographique existe. Un territoire a une Histoire qui forge un tempérament local. Et ces tempéraments peuvent changer considérablement d'un territoire à l'autre. Ces personnalités géographiques doivent être intégrées, respectées sinon les chocs sont terribles. Je ne connais pas bien la Catalogne, voire même pas du tout. Donc je ne peux pas en parler de façon détaillée. Une des rares fois où j'y suis allé c'était avec Alain Mérieux dans le cadre des moteurs de Rhône Alpes. Pour ce qui était pour moi une "région d'Espagne parmi d'autres", la rencontre avec Jordi Pujol m'était apparue irréelle : déjà un chef d'Etat. Puis, plus les déplacements ont été nombreux, plus cette réalité de la personnalité géographique m'est apparue manifeste. Avec parfois des surprises considérables entre les idées de départ et les réalités perçues à l'exemple des relations entre le Québec et les français. Cette personnalité géographique est construite par de nombreux facteurs dont l'Histoire. A force de marginaliser l'Histoire, trop de tendances durables sont sous-estimées, parfois même oubliées. Cette Histoire génère des codes, des usages, des réflexes. Et des divorces brutaux deviennent implacables si ces composantes sont inconnues ou méprisées. C'est tout le problème des néos dans une géographie. Il faut beaucoup d'humilité, de curiosité pour apprendre quand on est nouveau. Sinon des décalages naissent vite. Avec les migrations actuelles d'origines diverses (économiques, pauvretés, guerres …), c'est un enjeu qui va prendre une importance croissante manifeste. Cette réalité mériterait d'être mieux considérée dans de très nombreux endroits.
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La face cachée du prix du timbre
La nouvelle hausse du prix du timbre résume à elle seule le décalage culturel d'une partie du secteur public français. Dans le privé, une entreprise perd des clients parce qu'elle a la concurrence accélérée d'un autre procédé moins cher (les mails). Il ne lui viendrait jamais à l'idée de monter ses prix donc de creuser à son détriment son handicap face à son concurrent. A l'opposé, de ce constat, moins La Poste a de clients via le courrier traditionnel, plus elle "récompense" ses derniers fidèles en les faisant payer … plus cher ! La face cachée du timbre, c'est un secteur public habitué aux monopoles. Etre un point de passage obligé. Incontournable. Il pouvait y avoir des concurrences mais tolérées par la loi donc à condition que le monopole public les agrée. D'un seul coup, tout ce schéma là explose. Cette explosion montre combien cette culture des monopoles n'est pas habituée à l'explication. La Poste est l'un des plus beaux services publics français. Un service, fut-il même public, doit avoir un prix. Ce prix, c'est celui de la proximité, de la continuité, de la technicité. Cette bataille du prix devrait être livrée avec pédagogie. Il ne peut pas y avoir la même qualité de service avec un prix qui baisse tout le temps. Mais pareillement, il ne sera pas toléré par des clients qu'il y ait le même service avec un prix qui monte tout le temps. Si des sujets sérieux de ce type ne sont pas débattus dans la transparence, l'esprit de monopole va créer des crises redoutables. Des crises injustes parce que si la France reste encore un pays performant ce n'est pas grâce à son microcosme parisien mais grâce aux agents de terrain qui effectuent leur travail avec un professionnalisme remarquable. Cette face cachée du prix du timbre est très importante. Dommage qu'elle reste … cachée.
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Le début de la bataille de la redistribution
Malraux avait vu juste en évoquant la poussée du religieux dans le 21 ème siècle. C'est avéré. Il y a une autre bataille qui s'engage : celle entre d'un côté les producteurs de richesses par le travail et d'un autre côté les bénéficiaires de la redistribution par les aides sociales. La France sera au premier rang de cette bataille. En effet, le village planétaire c'est quoi ? C'est d'abord la possibilité de comparer les impositions pour aller vers les plus accueillantes. C'est le cas pour les sociétés comme pour les particuliers. Pour les sociétés, regardons actuellement la bataille pour un siège d'Amazon. C'est une compétition ouverte pour s'extraire des frontières. La localisation se fait presque à la criée pour aller à la meilleure offre : la moindre imposition avec le maximum d'aides. Pourquoi ? Parce que le gain pour la localisation sera dans la diffusion permanente des richesses : emplois directs, indirects … et non pas dans la brutalité de l'imposition globale. Pour les particuliers, le rebond du Portugal, c'est ce même socle pour partie à destination des seniors. Face à cette concurrence, que fait la France actuellement ? Non seulement, elle ne révise pas ses conditions de coût de son secteur public mais elle engage une logique de "secteur public punitif" : gagner par les amendes ou autres redevances ponctuelles ce que l'imposition globale n'offre plus parce qu'elle est au taquet. Et ce volet là sera de moins en moins accepté. Le divorce entre les imposés et les bénéficiaires est bien ouvert. Il risque de venir très violent rapidement.
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Les réalités oubliées
La vie publique française vit toujours au même rythme : un jour la publication d'un volumineux rapport et le lendemain l'oubli des conclusions comme si le rapport ne servait à rien sauf à alimenter un rayon supplémentaire de bibliothèques. Il y a 15 jours, Emmanuel Macron présentait son plan pour le numérique dont la volonté de créer des leaders. Mais comment un pays qui ne finance que 14 introductions en bourse par an en moyenne ces dernières années pourrait-il financer des leaders là où ailleurs, sur le même financement, par exemple le Canada en finance 100 en moyenne sur la seule Bourse de croissance de Toronto pour une levée moyenne de plus de 3 millions de dollars ? L'avenir économique est inscrit dans ces chiffres. Un rapport presque de 1 à 10. Parmi les nombreux prospectus d'introduction en bourse auxquels j'ai participé celui d'Ober montrait toute la gamme des possibilités que seule la Bourse offre : de la valorisation post IPO à la faculté de cessions de titres permettant des évolutions rapides du périmètre d'actionnariat … Sans cette introduction, cette société n'aurait jamais pu affronter avec efficacité ses défis stratégiques d'alors. Ce n'est pas avec 2 ou 3 business angels plaçant au mieux 50 000 € d'économies pour surveiller à ce titre l'équipe de gestion et tromper l'ennui d'une retraite trop frustrante que cette société aurait pu "changer de gamme". Au rythme actuel, la France se prépare à une petite économie régionale en ayant quitté tous les hauts de classements des segments d'avenir. Cette réalité est inscrite dans les actuels chiffres. Ce sera intéressant d'écouter Emmanuel Macron ce soir sur ce sujet à la condition que la question soit posée bien sûr …
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La vérité sur la crise de 2008 verra-t-elle le jour ?
Le livre de Yanis Varoufakis sur la crise de 2008 est terrifiant. En juillet 2015, Yanis Varoufakis avait révélé avoir secrètement enregistré certaines réunions de l’Eurogroupe, ce club informel des ministres des Finances de la zone euro. Il s’était alors engagé à en dévoiler le contenu dans un livre. C'est fait avec Conversations entre adultes. Et dans ce livre, comme déjà évoqué par des auteurs alors rapidement marginalisés, Yanis Varoufakis démontre qu'il n'a jamais été question de sauver la Grèce mais de sauver des banques trop exposées. Un livre qui est terrible sur les rapports de forces au sein de l'Europe, sur les véritables objectifs de l'Europe, sur le fonctionnement des démocraties occidentales et sur la puissance sans contrepoids de l'Allemagne. Il mériterait davantage d'exposition médiatique. Si ce n'est pas le cas, sans tomber dans la détestable mentalité du complot, il y aura de sérieuses questions à se poser sur le quadrillage du système démocratique européen… La vérité sur la crise de 2008 sortira-t-elle seulement un jour … ?