Denis Bonzy

La France deviendrait-elle une île ?

Trump 06 11 16

Pendant des années, j'ai pratiqué les enquêtes d'opinion. Je les ai organisées. Etudiées. Enseignées. A la lumière de cette expérience, je ne vois pas comment l'opinion publique française pourrait actuellement devenir "centriste" au moment où les radicalisés gagnent du terrain partout. Dans aucun pays démocratique, une situation de crise économique durable (8 ans à ce jour soit une séquence temps énorme !), exposé à des confrontations violentes (terrorisme, choc des identités …), secoué par des remises en question de ses dispositifs de protection sociale (régimes santé, retraites) et constatant une classe politique décrédibilisée n'accouche d'un vote modéré, "centriste". C'est du jamais vu. Quand il y a autant de raisons objectives de colères, la colère s'exprime et jamais dans la modération ! 

Jamais vu ni dans l'histoire ni dans le présent.

Dans le présent, toutes les élections sont marquées par une radicalité nouvelle :

1) Trump a fait sauter les frontières du "politiquement correct" aux Etats-Unis. Même avec une "campagne catastrophe" il va terminer au pire à moins de 5 points de sa concurrente. Une faiblesse d'écart qui mérite la réflexion,

2) En Italie, en juin 2016, le Mouvement 5 Etoiles de Beppe Grillo a gagné des "villes capitales" dont Rome,

3) A Madrid, Podemos a gagné la ville et le pays n'a pas de majorité parlementaire en raison de l'explosion de ses forces politiques,

4) A l'Est, les partis dits "populistes" gagnent,

5) Dans les pays du Nord, les mêmes partis progressent considérablement,

… : et en France la majorité se ferait dans la modération au centre …

Pour qu'il en soit ainsi il faudrait que la France devienne une île. Ce qu'elle n'est pas et n'a jamais été. Il faut se méfier des radicalisations rentrées. Quand elles s'expriment c'est avec encore davantage de violence. A ne pas vouloir engager des actes visibles fort de refondation d'un système politique discrédité, les partis politiques français traditionnels jouent avec le feu. L'opinion publique française aime les "coups de sang". Les sondages ne les prévoient pas mais les élections les constatent.

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