Pendant longtemps en France, une opposition existait entre ceux qui vivaient dans le secteur privé du fait de commercialiser des prestations ou des produits et ceux qui travaillaient dans le secteur public supposé échapper à "l'esprit marchand". Dans ce cadre, "faire de la politique" était noble. Mais depuis longtemps déjà, en France, la démocratie a désormais ses marchands : ceux qui vendent des décisions en contrepartie de … voix électorales. Quand il est maintenant question de quartiers comme "Molenbeek", c'est quoi sur le fond : la remise en question de pratiques marchandes qui ont consisté à accepter des zones de non droit en contrepartie de reports électoraux. C'est d'ailleurs ce qui est le plus inquiétant dans la période actuelle : l'incapacité à identifier clairement, expressément les causes de maladies collectives. Comment les soigner faute de cette étape ?
Comment s'est installée cette "culture marchande" dans la démocratie française? Pour qu'il y ait des marchands, il faut qu'il y ait des … clients. Depuis 15 ans, la démocratie française est une zone de marchandise puisque les électeurs sont devenus des clients qui conçoivent le vote comme un acte de consommation individuelle.
Des exemples précis :
- les aides publiques aux associations sont des procédés de marchandisation par bloc de centres d'intérêts,
- les PLU avec la classification des terrains et la superficie minimale sont le message aux propriétaires fonciers,
- les recrutements dans la fonction publique territoriale communale sont souvent des façons de conforter les "bonnes grâces" de tels ou tels groupes de pression,
- quand des régies publiques gèrent des équipements sportifs, quelle régie en France n'a pas institutionnalisé le recrutement de "grands frères" des quartiers difficiles pour qu'ils "négocient" la paix avec leurs "connaissances" ?
- …
Voilà comment fonctionne la démocratie française loin des grands principes des "pères fondateurs" avec leurs constructions abstraites, généralistes.
Pourquoi cette évolution dramatique ?
1) Parce que
la décentralisation s'est accompagnée d'un recul quasi-total de l'Etat. Quand les Préfets tombent dans le copinage politique local pour accélérer leur carrière davantage que dans le respect du droit, l'Etat bat retraite en morne prairie à la connaissance de chacun,
2) Parce que la France ne pratique pas la limitation des mandats dans la durée. La gestion des réseaux facilite la ré-élection des sortants. Il suffit d'agiter la menace de la remise en question par un autre candidat pour provoquer un réflexe conservateur de la part des réseaux : "et si leurs avantages étaient remis en cause …?". Le dispositif des réseaux ne se bouscule que par la sur-enchère, le toujours davantage.
3) Parce que la France est incapable de regarder avec lucidité ses blocages et ses fautes. Le parisianisme est déconnecté des réalités du terrain. Et sur le plan local, comme la politique marchande alimente large, qui pourrait dénoncer un système qui le nourrit ?
Tant que ces réalités continueront, la France est peu disposée à gagner sérieusement la guerre contre les quartiers de non droit.
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