Denis Bonzy

Politiques : ont-ils peur de la province ?

Les 15 premiers jours du "retour" de Nicolas Sarkozy sont assez decevants. Sur le plan numérique, il promettait la "plus belle campagne depuis celle d'Obama en 2008". Or, c'est le vide. Même pas un blog dédié. Sur le terrain, il reste à la logique de la "plongée ponctuelle" si possible avant 20 heures pour que les journaux TV puissent reprendre les formules. Déjà vu. Surtout, déjà pratiqué par tous les autres compétiteurs. 

Cette logique de la plongée ponctuelle (3 heures au plus) est surprenante. Elle est très éloignée des pratiques qui ont fait des succès. En 20 ans, j'ai participé à de nombreuses visites de ce type. 

Les échecs les plus notoires sur cette période ont été les suivants. Raymond Barre dans le Vercors lors de la présidentielle 1988. Jean Faure avait beaucoup intrigué auprès d'Anne Marie Comparini pour que Barre fasse un saut dans le Vercors. Il y avait de la neige. Depuis 24 heures, le vent du Sud avait pris le dessus rendant la neige très molle. Eva Barre accompagne son mari en … petits escarpins des villes. Elle glisse. Elle se mouille les pieds … Le cortège officiel était pris de "fou rire" en attendant la prochaine … glissage et surtout la tempête d'adjectifs qui allait suivre de la part de l'épouse de l'ex-Premier Ministre a priori pourtant très … policée.

Autre couac, VGE à la Mairie de Grenoble. Il pleut. Le Conseil Municipal doit lui être présenté. Il entre dans la salle du conseil. Il se fige. Ne quitte pas son imperméable tant que le chef du protocole ne vient pas lui retirer. "Le personnel de service" faisait défaut. Incroyable !

Une déception également a été Villepin. Dominique de villepin 08 08 13Avec Sihame Arbib, nous lui indiquions qu'il fallait rencontrer les militants. Jamais fait. Ainsi, à Grenoble, Renaud de Langlade avait préparé un programme de qualité. Mais en dehors de l'attention que l'ex Premier Ministre manifestait pour les journalistes, les militants de République Solidaire n'étaient manifestement pas parmi ses priorités. Dommage.

La liste de visites sur le terrain qui tournent au fiasco serait longue : Madelin, Giraud, Veil (tempérament exécrable  à l'opposé de l'image douce) …

Face à ces échecs qui en disent long sur le tempérament des intéressés, il y a des réussites considérables.

Chirac reste un modèle en la matière. Il dormait sur place, ce qui parait impossible désormais pour les candidats. Et jusqu'à 2 heures du matin, il était disponible y compris pour aller rendre visite à une section de militants au fond de la campagne. Lors de déplacements professionnels, j'ai beaucoup entendu parler de pratiques identiques de la part de Mitterrand. Je  ne peux pas en parler pour y avoir participé. Ce n'était pas mon camp politique et je n'ai jamais apprécié ce personnage qui marque pour moi le tournant noir des pratiques de la Vème République.

Payre 22 02 14Denis Payre  en 2014 a effectué un terrain remarquable avec un réel sens du contact. Dommage qu'il n'ait pas libéré sa soirée mais tout au long de la journée il a témoigné un sens du dialogue inattendu. Une disponibilité et une simplicité exemplaires.

Disponibilité et simplicité exemplaires qui sont le cas également pour Alain Mérieux qui est souvent venu dans le canton de Vif à ma demande. 

Ces chefs d'entreprises ont souvent manifesté une capacité à dialoguer largement suprieure à


celle de politique.

Merieux alain

Les modèles de terrain sont aux Etats-Unis. C'est une plongée au coin de la rue. Toutes les journées sont sur le terrain. J'ai découvert cette logique lors d'un stage dans l'équipe de Kerry à Boston.

Cette découverte s'est toujours confirmée. Quatre expériences chocs. Deval Patrick à Cape Cod en 2008.

Dans la salle principale du restaurant, une quarantaine de tables au moins. Chaque table a une place vide. Cette place vide est pour … Deval Patrick qui va ainsi partager une partie du repas avec chaque table à l'opposé de la culture de la … "table officielle".

Clinton à Philadephie lors de sa première présidentielle et sa spécialité des mains serrées auprès des conducteurs aux feux rouges.

Hillary Clinton au Faneuil Hall de Boston quand elle se rend dans la galerie marchande et va partager un hot  dog sur les bancs de ce secteur piéton. Pas une main ne lui échappait. Incroyable, une vraie machine à serrer les mains et toujour ssourire.

Et bien entendu, Kerry et son arrivée au Fleet Center en 2004. Kerry 03 01 13Il était "chez lui". Pour la première fois à ce point, je voyais une ville partager l'aventure de son candidat à une présidentielle. La foule  était même massée dans le quartier de Beacon Hill où elle a pu voir le candidat rentrer chez lui avec un sac de repas froid à la main et serrant les mains comme s'il s'agit de voisins avec le plus grand naturel.

Toujours à Boston en 2008, les militants évoquaient alors les  venues de Barack Obama avec son pilot case à roulettes et plusieurs cafés dans le voisinage de Copley Square affichaient les photos de petits déjeuners pris sur place …

Obama 05 10 14

En France, tant que les candidats ne vivront pas ainsi de réelles séquences de vie en province, la réconciliation avec la politique sera difficile. 

 

Commentaires

Laisser un commentaire