Denis Bonzy

Le 4 septembre : le coup de poing québécois

Au moment où la France sombre dans le défaitisme, dans la sourde colère face à l'amateurisme et surtout face aux contradictions du nouveau Gouvernement, le vote du 4 septembre au Québec peut être porteur de fortes leçons. Dès les premiers jours du printemps érable, nous avons évoqué ce mouvement. Puis, nous avons présenté à plusieurs reprises l'un des candidats emblématiques Léo Bureau-Blouin.

Au départ, le Parti Québécois était l'outsider au sens premier du terme :


celui qui est "hors la course". Le duel devait être entre le Parti Libéral et la Coalition Avenir Québec. Mais le PQ (Parti Québécois) a changé la donne : appel aux jeunes, aux membres de la société civile, propositions fortes pour une nouvelle gouvernance reconnaissant en permanence une place plus forte aux citoyens …

Le PQ a mené une campagne faite par les citoyens, pour les citoyens. Il a redonné l'espoir d'une ré-appropriation de la démocratie par les citoyens. 
LBB

C'est dommage que les médias français aient si peu couvert cette campagne. Elle a été belle, moderne, imaginative.

L'outsider est en tête maintenant. Certes le nombre record d'indécis à trois jours du vote ne permet pas de tirer des conclusions définitives. Mais la belle démocratie québécoise, aujourd'hui très en avance sur le démocratie française, vit l'espoir quand la France vit la morosité et le défaitisme.

La leçon n° 1 : la démocratie est d'abord ce que les citoyens en font. S'ils abandonnent leurs pouvoirs à des partis politiques, les citoyens sont les premières victimes de jeux qui les placent en permanence au vestiaire : être juste bon à payer sans agir.

Avec une arrogance quasi-insupportable, les corps intermédiaires français voient toujours le Québec comme la lointaine province qui idéaliserait la France. Mais cette province se sait aujourd'hui en avance sur la France. C'est la même arrogance qui conduit aujourd'hui à se moquer du discours de Clint Eastwood lors de la Convention Républicaine. Mais là, un pas supplémentaire est effectué. Le prêt à penser est poussé à sa caricature. Les directeurs d'opinions tirent les leçons sans même donner la traduction du discours : pas besoin de connaître les faits pour les commenter.

Face à la crise, les citoyens aspirent à être plus exigeants face aux pouvoirs. Des pouvoirs qui n'ont été ni capables de prévoir la crise, ni capables de l'éviter et encore moins de la traiter dans la rapidité ou dans l'efficacité.

Qu'a dit Clint Eastwood pour l'essentiel :

"Je sais ce que vous pensez : il n’y a que des gauchistes à Hollywood. Et bien non, il y a aussi des conservateurs », a-t-il lancé en introduction.

Puis, il a simulé la présence du Président Obama assis à côté de lui sur une chaise. Ce n'était pas la mise en scène la plus réussie mais chaque Convention impose des formes un peu particulières.

Puis il ajouté :

« On parlait du “Yes we can”, tout le monde pleurait, allumait des bougies, même moi je pleurais.

Et finalement, je pleure encore plus fort quand je réalise qu’il y a 23 millions de chômeurs dans ce pays. Ça, c’est une bonne raison de pleurer. L’administration n’en a pas fait assez pour changer ça. Et je me dis que maintenant, il est temps de faire venir quelqu’un de neuf pour régler ce problème. »

La conclusion a galvanisé la salle :

« Je voulais vous dire : ce pays nous appartient, il n’appartient pas aux politiques, ils ne sont que nos employés.

Quand quelqu’un ne fait pas le travail, qu’il s’en aille".

C'est une phrase de bon sens. Il n'y a pas matière à organiser des controverses sur cette conclusion.

Il est vrai qu'elle tranche tellement avec l'irresponsabilité qui peut exister en France pour la caste politique. C'est tellement provocateur de demander aux élus de connaître la règle qui est celle de tant d'autres domaines avec si souvent tellement moins de filets de protection. 

Si la France décroche comme il est tant question aujourd'hui, n'est-ce pas d'abord parce que les citoyens ont ici décroché depuis si longtemps déjà par rapport à des règles simples de fonctionnement et de respect de la citoyenneté ?

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