La candidature d'Axel Kahn dans la 2ème circonscription de Paris pourrait marquer un signe précurseur de l'arrivée de la société civile lors des législatives 2012 face à Rachida Dati et / ou François Fillon. Un signe intéressant à la fois novateur et limité.
Novateur, car c'est une arrivée d'un membre de la société civile dans le combat de professionnels de" haut vol" de la politique (un ancien Premier Ministre et une Ministre emblématique). Mais c'est un signe limité, puisque l'intéressé doit avoir le recours au label d'un parti politique. Il restera à surveiller comment ce label sera donné … et l'exercice qu'il en fera.
Des actuels contacts ou informations du terrain, il ressort qu'un premier frémissement se produit actuellement en faveur de l'arrivée de la société civile dans la vie politique française.
Tout d'abord, il importe de parler d'arrivée et non pas de retour car la société civile est toujours demeurée peu présente dans la vie politique française.
Ensuite, il est nécessaire de rechercher le facteur explicatif. C'est probablement le rejet de l'actuelle vie politique donc la volonté de rechercher d'autres viviers. On ne naît pas responsable politique. On le devient. Rapidement, un mimétisme dégage ce qui est désormais perçu comme des « attributs » de la classe politique par opposition aux traits dominants de ceux qui n’appartiennent pas à cette « classe ».
Ces attributs touchent à l’apparence comme au contenu même de l’expression. L’apparence paraît toujours guidée par une attitude hautaine qui maintiendrait les intéressés au-dessus du commun. La place éminente du "je" quand il n'est pas sur-ajouté de "moi-même". Le costume cravate avec des couleurs sombres est ainsi devenu une sorte d’uniforme trans-partis. Quant à l’expression, elle est fortement matinée d’intellectualisme littéraire quelle que soit d’ailleurs la formation initiale des intéressés.
Le plus étonnant, ce n’est pas tant l’existence de tels traits dominants mais l’attractivité longtemps exercée par ce code de conduite adopté de façon caricaturale par ceux que pourtant leurs parcours initiaux avaient éloigné de tels comportements. Après l’entrée dans cette « classe politique » des femmes se déféminisent, même d’anciens ouvriers communistes s’approprient tous les critères du notable politique …
Cette situation est aujourd’hui menacée par des signes annonciateurs d’éventuels changements profonds à l'exemple de l'’émergence d’une méfiance vis-à-vis du Pouvoir.
Pendant des décennies, les citoyens Français ont entretenu un rapport particulier avec l’Etat. Ils voyaient l’Etat comme ils voyaient les monarques, plus alliés qu’ennemis, plus protecteurs que dangereux, plus garants que menaçants.
Ces qualités de protection, de sécurité, de gardien de la liberté individuelle s’effondrent ou se sont déjà effondrées. Comment l’Etat pourrait-il être crédible pour protéger autrui alors qu’aux yeux d’un nombre de plus en plus important il n’est déjà plus apte à se protéger lui-même, que son fonctionnement est éloigné des règles élémentaires d’efficacité et encore davantage d’efficience ?
La population évolue donc vers une conception à l’anglo-saxonne marquée par la méfiance vis-à-vis du Pouvoir. Elle craint les abus de pouvoirs ; donc elle souhaite que le Pouvoir fasse peu, ne s’occupe plus de tout.
L’exemple le plus poussé de cet état d’esprit est celui des USA où la liberté c’est l’absence de Gouvernement.
Cette évolution impacte tous ceux qui incarnent le Pouvoir. Elle impacte également ceux qui sont des « satellites » du Pouvoir à l’exemple de la presse.
Cette méfiance creuse un fossé entre les personnes de Pouvoir et les citoyens. Tant que ce fossé existera ou pire s’il s’amplifie, c’est le divorce assuré entre deux mondes au mieux séparés et au pire totalement opposés.
Mais surtout, le troisième facteur réside dans la crise actuelle. Face à la crise, c'est la fin du «prêt à penser» avec la mode éventuelle aux « iconoclastes » voire même aux rebelles. Le divorce entre la « classe politique » et les citoyens laisse un espace pour une nouvelle pensée et pour une nouvelle parole qui heurtent délibérément les « repères officiels ».
L’opinion publique française va-t-elle installer une mode passagère ou réellement un nouvel état d’esprit ?
Si c’est une mode passagère, son caractère éphémère va signifier qu’en dehors de « marginaux médiatiques », tout rentrera vite dans l’ordre traditionnel. La « classe politique » ne sera donc pas sérieusement ébranlée dans ses repères habituels lors des élections de juin 2012.
Si c’est l’installation d’un nouvel état d’esprit, il faut se préparer à l’émergence d’actes fondateurs nouveaux. A vouloir exclure les citoyens de la « classe politique » cette dernière risque une arrivée en force des premiers particulièrement violente ?
C'est un rendez-vous intéressant à suivre sur 2012 entre l'opinion et elle-même donc les profils de candidats qu'elle porte.
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