Denis Bonzy

Christian Bec : la bataille pour l’emploi : une priorité pour 2011

La France compte plus de 2 millions 600 000 demandeurs d’emploi sans aucune activité.

Si l'on prend en compte tous les demandeurs d'emploi, même ceux qui ont une activité réduite, on arrive à plus de 3 millions 900 000 chômeurs.

Selon l’Insee, le taux de chômage au sens du Bureau international du travail (BIT) s’établit en moyenne à 9,7 % de la population active (DOM inclus), et à 9,3 % pour la seule France métropolitaine.

Le nombre des chômeurs de longue durée inscrits depuis au moins 1 an a augmenté de plus de 20% sur les douze derniers mois.

Je ne souhaite pas analyser les variations souvent positives de ces derniers mois. Les progressions enregistrées, si elles peuvent augurer d’un début de sortie de crise, ne sont pas suffisamment importantes et constantes pour permettre de tirer des conclusions hâtives sur l’évolution de la courbe du chômage dans les mois à venir. En effet, la reprise est très lente et l'activité n'est toujours pas revenue au niveau d'avant la crise. Les entreprises qui ont résistées au coeur de la tempête ajustent désormais leurs effectifs. Ces ajustements peuvent se traduire par une baisse des effectives. La création d’emplois, quant à elle, n’est pas franche et se traduit par des missions intérimaires ou des contrats à durée déterminés.

La majorité des experts s’accordent sur la perspective d’une année encore difficile sur le front de l’emploi.

Ce retour du chômage de masse vient briser un rêve: celui de voir le papy-boom résoudre la question du chômage sans qu'il soit nécessaire désormais que les décideurs politiques s'occupent activement de l'emploi. Dans un tel contexte, le retour du chômage de masse risque d'avoir, au-delà même des importantes difficultés qu'il impose à ceux qui le subissent directement, un effet particulièrement délétère sur une société française dont la cohésion sociale était déjà très fragilisée. Cette situation désespère la jeunesse qui s'était prise à croire que les papy-boomers allaient enfin lui céder la place en masse sur le marché du travail.

L’emploi est au cœur de toute politique ambitieuse et nécessite une mobilisation générale. Les politiques de l’emploi, qui à mon sens dépassent les clivages droite-gauche, seront au cœur des débats et des priorités en 2011. Des mesures et des organisations doivent permettre d’augmenter le taux d'emploi de la population en âge de travailler et favoriser le « plein emploi ».

Pour ce faire, il est utile de trouver le juste équilibre entre une politique active cherchant à accroître le niveau de l'emploi dans l'économie, et une politique passive dont l'objectif est de rendre le chômage supportable avec la volonté de ne pas accroître la demande.

Pole emploi doit s’imposer comme l’organisme majeur du service public de l’emploi français.

Jusqu’alors, le service public de l’emploi était éclaté entre plusieurs intervenants, les deux principaux étant l’ANPE et le groupe Unédic-Assédic. La confusion des missions entre les deux organismes opérant plus ou moins indépendamment l’un de l’autre génèrent des incohérences et des redondances qui ne favorisent pas le reclassement rapide et efficace des demandeurs d’emploi.

Je suis personnellement convaincu du bien fondé de cette fusion.

Selon les résultats de la grande consultation souhaité par Laurent Wauquiez et menée auprès de 500 000 demandeurs d’emploi, 80% des DE se disent satisfaits de la gestion du paiement de leur indemnisation contre 52% au sujet de l’accompagnement et du placement. La prise en compte de cette faiblesse passe inévitablement par l’optimisation et la rationalisation des offres d’emploi, par le renforcement de la relation avec les entreprises et le développement de la prospection.

Cet axe de progression est incontournable pour Pôle emploi. Cet objectif doit se structurer autour des axes suivants :

 

  • Faire connaître l’offre de service de Pôle emploi auprès des employeurs et la pertinence des organisations mises en place pour optimiser le reclassement des demandeurs d’emploi (anticiper les évolutions et mutation des métiers, les besoins futurs en main d’œuvre et en qualification, les profils et les formations adaptés aux évolutions du marché de l’emploi, etc.).

Il faut créer ou renforcer une situation de confiance entre les employeurs et Pôle emploi. Il s’agit d’une véritable action « marketing » visant à présenter et promouvoir les services et les prestations de Pôle emploi ainsi que son savoir-faire en matière de recrutement.

  • Renforcer la part de marché en matière d’offres recueillies et traitées mais également au niveau des offres satisfaites et des offres « placées ». La valeur ajoutée de Pôle emploi est représentée par les mises en relation positive, c'est-à-dire ayant abouti à l’embauche.

 

  • La relation de proximité avec les employeurs permet d’établir une relation de confiance et de définir avec précision les services attendus par l’employeur (type de diffusion de l’offre, calendrier de suivi, délai de présentation des candidats, nombre de candidats, etc.) qui seront mis en œuvre lors du traitement de l’offre d’emploi.
  • Améliorer la qualité de la pénétration de Pôle emploi sur le marché du travail. L’objectif est de construire et de conforter le rôle de Pôle emploi. Il s’agit d’être reconnu par ses partenaires et les employeurs en tant que gestionnaire d’offres d’emploi et acteur incontournable du placement. Il faut à mon sens évoquer une action de conseil en recrutement, de négociateur des offres et des demandes (voir de profileur) en faisant émerger des opportunités d’emplois peu accessibles car cantonnées dans le « marché caché ». Cet objectif implique un investissement dans la prospection des entreprises et la collecte d’offres d’emploi. La perspective poursuivie est de contribuer à structurer le marché du travail, non seulement en captant des offres d’emploi qui ne sont pas aisément repérables pour les demandeurs d’emploi, mais aussi, et surtout, en contribuant à la qualification de l’offre et en conseillant les employeurs dans leurs procédures de recrutement.

La relation de proximité permet d’être au plus près de la diversité des comportements des entreprises et de répondre par une réactivité adaptée. Cette relation privilégiée intègre l’activité des services en direction des entreprises visant l’aide au pourvoi des postes vacants par l’identification du besoin de l’entreprise et le traitement de l’offre d’emploi.  Au-delà des entreprises, il est important de créer un réseau avec les instances du monde de l’emploi telle que la Chambre de Commerce et d’Industrie.

Cette relation facilite la connaissance précise du bassin de l’emploi, non seulement sur la santé de ces secteurs, leurs perspectives ou leurs difficultés, mais aussi sur leurs normes de gestion de l’emploi, leurs spécificités et leurs règles. Cette expertise procure de la légitimité pour négocier avec les employeurs. Elle permet aussi de repérer plus aisément les offres « décalées » et/ou « aberrantes » et de les faire évoluer pour qu’elles puissent être pourvues. 

  • Sur le fond, le service aux entreprises déployé par Pôle emploi ne doit pas exclusivement se résumer à un rôle de « sous traitant » accompagnant les exigences de l’employeur mais à un partenariat actif structuré autour d’une coproduction visant la satisfaction des offres des employeurs et le reclassement des demandeurs d’emploi. Cette démarche renforce la fidélisation des entreprises auprès de Pôle emploi.

 

Christian Bec

Commentaires

Laisser un commentaire