Denis Bonzy

La politique sans l’opinion

Depuis les élections régionales de mars 2010, une séquence temps très intéressante est ouverte. La vie politique tourne dans le vide. L'opinion a manifestement décroché comme si elle ne "voulait plus jouer".

Le mini-remaniement ministériel a été "digéré" en quelques jours. Les entrants (Baroin, Tron) peinent à exister alors même qu'ils étaient supposés faire vivre des sensibilités différentes. Les membres plus anciens sont absents à l'exception de Woerth exposé par le dossier des retraites.

Nationalement, aucun sujet ne mobilise.


L'identité nationale a quitté le devant de la scène. La crise est installée comme durable. L'écologie ne fait pas naître de grandes causes. La Grèce inquiète et chacun se dit à "quand le tour de la France" … ?

Sur le plan des régions, les "nouvelles" assemblées sont installées dans la discrétion voire même dans l'indifférence générale. En Rhône-Alpes, Queyranne a modifié l'exécutif mais cette modification est passée inaperçue ou presque. En Isère, à l'exemple de ce climat national, la "grande cause" du contournement de Grenoble est passée aux oubliettes en 15 jours pour cause d'un avis technique négatif. Les violences barbares du 9 avril ont gravement impacté l'image de marque de Grenoble à l'extérieur. Et alors … ? Une élection partielle législative est programmée avec une campagne qui doit compter avec les ponts, les fins de semaines allongées de RTT … c'est à dire un mois de loisirs loin des soucis civiques.

L'opinion est "ailleurs". La politique ne la mobilisait plus. Elle donne même désormais le sentiment de ne plus l'intéresser du tout. Ce qui compte c'est l'organisation individuelle pour traverser la crise à moindres dégâts.

Qu'annonce cet état d'esprit rare à ce point ?

Dans les enquêtes d'opinion, il y a actuellement deux désirs qui méritent l'attention. Le désir de gauche trouve un nouvel espace dans les enquêtes comme si d'un coup l'opinion se souvenait que la droite était installée à la présidence de la république depuis 1995. C'est un désir instable parce que la gauche offre plusieurs visages différents et qu'elle incarne aussi le passé et l'échec. C'est pourquoi, perce également un autre désir : le désir de neuf. C'est un désir plus brouillon parce que le neuf n'a pas encore contruit "son identité". Il a plusieurs noms possibles. C'est un climat assez comparable à celui de 2006 au début des primaires présidentielles américaines avant que ce désir de neuf ne prenne le visage de Barack Obama. En Grance-Bretagne, la percée de Nick Clegg est d'un ressort assez proche. C'est probablement par le neuf que l'opinion va chercher à se recycler en politique. Une façon de se donner une nouvelle chance sans se renier…

Commentaires

Une réponse à « La politique sans l’opinion »

  1. Avatar de Jorice Samuel
    Jorice Samuel

    Je crois que si l’opinion se desinteresse de la politique, c’est qu’elle a le sentiment qu’aujourd’hui les politiques ne peuvent plus rien faire pour ameliorer le quotidien des personnes. Nicolas Sarkozy avait ete un tres bon candidat, avec un discours franc et tres difficile a porter en tant que candidat mais la France etait sensible a cette volonte de reforme et de changement. Malheureusement, il est aujourd’hui un tres mauvais president et il a decu la majorite de ces electeurs qui se disent donc que si le candidat avec la plus grande volonte n’aarive pas a faire bouger les choses, c’est vraiment que le politique aujourd’hui n’a plus aucune marge d’action face a des contre-pouvoirs que sont les administrations, la commission europeenne etc.
    Pour revenir a votre note, il semble sur de nombreux aspects que la presidence Sarkozy est tres comparable a la presidence Giscard a la fin de laquelle, le desir de gauche etait egalement tres fort.
    Puisque vous parlez de la Grande-Bretagne, il y aurait egalement de nombreuses choses a dire, avec des campagnes qui sont quelque peu differentes des campagnes electrorales francaises. Cela dit, le desir de changement se fait aussi sentir et pas reellement pour le parti conservateur mais pour les partis tels que le Lib-Dem qui n’ont jamais ete au pouvoir, sur fond des derniers scandales et du « tous pourris ». Meme si l’issue du scurtin est incertaine, tant la percee des liberaux (avec beaucoup moins de moyens que les deux autres challengers) change la donne, je doute que les anglais choisissent au final de donner leur confiance a un parti dont au fond d’eux ils doutent profondement de la capacite a gouverner… C’est en tous cas un scrutin a suivre car il sera interessant d’enseignements.

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